
Murielle et Didier Potiron, un couple d’éleveurs originaire de Puceul (Loire-Atlantique), assistent, impuissants, au décès de leurs animaux. (©L’Éclaireur)
Le parc éolien des Quatre seigneurs, sur le territoire de la Communauté de communes de Nozay, au nord de Nantes (Loire-Atlantique) fait couler beaucoup d’encre depuis plusieurs années. Un certain nombre de riverains, dont le couple d’agriculteurs Murielle et Didier Potiron, l’accusent d’être la source de multiples maux – certains très graves – chez les humains et les animaux.
Afin de tenter de tenter d’avoir le fin mot de l’histoire, l’État a lancé courant février 2019 une expertise poussée du parc éolien incriminé et du comportement des troupeaux des deux exploitations agricoles impactées. Les premiers résultats constatés en mars sont totalement inattendus…
Retour en arrière…
Cela fait plusieurs années que le parc éolien des Quatre seigneurs, construit en 2012 à cheval sur les communes de Nozay, Puceul, Abbaretz et Saffré, alimente la polémique.
Animaux d’élevage en surmortalité ou victimes de nombreux troubles du comportement, habitants également touchés par des maux de gravité diverse… Des problèmes mis sur le compte d’ondes produites par les aérogénérateurs, mais difficiles à relier, scientifiquement parlant.
En mai 2016, L’Éclaireur avait rencontré un couple d’agriculteurs de Puceul, Murielle et Didier Potiron, installé à quelques centaines de mètres du parc et particulièrement touché par toutes sortes de problèmes depuis la réalisation des éoliennes : maux de tête, troubles du sommeil, sensation permanente de grande fatigue éprouvée sur leur exploitation, et disparaissant dès qu’ils s’en éloignent pour quelques jours…
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Des vaches stressées, des vêlages difficiles…
Des problèmes intervenus après ceux rencontrés par leurs vaches laitières, devenues totalement réticentes à réintégrer les bâtiments de repos et de traite dès le coulage des fondations des éoliennes. Dès 2016, les éleveurs relataient :
La qualité du lait était en baisse aussi. On a également constaté de gros problèmes de vêlage, chez des animaux stressés. »
Différentes études menées par des géobiologues ont conclu que ces maux étaient probablement provoqués essentiellement par des ondes électromagnétiques issues du câble en cuivre reliant, sous terre, les huit éoliennes entre elles.

L’éleveur Didier Potiron et l’une de ses vaches au « comportement anormal », mis sur le compte du parc éolien des Quatre seigneurs, en région de Nozay (Loire-Atlantique). (©Eclaireur – Cécile Rossin)
Des failles d’eau dans le socle rocheux
Des ondes propagées de façon particulièrement intense par l’existence de failles dans le socle rocheux sous-jacent ; failles remplies d’eau le plus souvent. Problème : les preuves scientifiques concrètes manquent et l’expertise menée en 2015 par le GPSE (Groupe permanent pour la sécurité électrique en milieu agricole), à la demande du gouvernement, n’avait « pas mis clairement en évidence de lien de cause à effet entre les éoliennes et ces problèmes de santé animale et humaine », soulignait Didier Potiron.
Trois ans plus tard, leur situation – et celle de nombreux autres riverains – s’est encore aggravée, sans qu’aucune solution n’ait encore été trouvée. Murielle Potiron, épileptique depuis 2006, explique :
Cela s’est sérieusement aggravé depuis la construction du parc. Depuis 2016, j’ai même fait deux ou trois crises de convulsions particulièrement violentes, avec notamment un trauma crânien et une dent cassée suite à l’une d’elles… »
Plus de 300 bêtes décédées depuis 2012
Concernant leurs bêtes, les chiffres de mortalité sont éloquents :
On est passé d’une moyenne de 10-15 bêtes mortes par an entre 2010 et 2012 à une moyenne de 50 morts par an, toutes catégories confondues (vaches, veaux, génisses…) depuis 2012 ! Soit plus de 300 bêtes décédées depuis la mise en service du parc éolien ! »
Photos, vidéos et démonstrations sur place à l’appui, Didier et Murielle Potiron montrent des vaches au comportement totalement inhabituel : une démarche hésitante et tremblante, comme si elles redoutaient chaque contact avec le sol, sous lequel passent de très nombreuses failles d’eau. Des pattes anormalement gonflées, des yeux exorbités, un refus de se coucher dans certaines parties des stalles…
« Regardez, elles préfèrent se coucher dans la m… plutôt que sur la paille, car à cet endroit, des failles souterraines doivent provoquer des courants électromagnétiques », montre Murielle Potiron.
Des bâtiments pourtant conformes
Les animaux rechignent aussi à boire l’eau de leurs abreuvoirs, sans doute pour les mêmes raisons. Et les problèmes de vêlage sont toujours d’actualité. Les éleveurs précisent que plusieurs de leurs animaux de compagnie, chats et chiens, sont aussi « victimes régulièrement de convulsions et de désorientation ».
Les diverses études déjà menées sur place, aussi bien par des experts payés par les agriculteurs que par ceux de l’exploitant du parc éolien, ont permis de prouver que ces divers problèmes ne venaient ni de la nourriture, ni de la construction ou de l’équipement des bâtiments agricoles, ni d’un quelconque virus. Aucune anomalie n’a été relevée dans la façon de travailler des agriculteurs. Et d’ailleurs, une autre éleveuse riveraine du parc connaît exactement les mêmes soucis avec ses vaches.
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Soutenus par le député Yves Daniel
Toujours suivis et soutenus de près par le député Yves Daniel, réélu en 2017 sous l’étiquette de la majorité gouvernementale (LREM), ils ont obtenu le lancement d’une nouvelle expertise, plus poussée, dirigée par les services de l’État.
Des appareils de mesure et des caméras ont donc été installés dans les bâtiments des deux exploitations agricoles concernées par ces problèmes : celle du couple Potiron à Puceul, et celle de Céline Bouvet-Niol, à Saffré.
Les appareils de mesure électrique ont été posés par le cabinet Cetim, payé par l’exploitant du parc éolien, explique Didier Potiron. Les caméras ont été installées par l’école vétérinaire Oniris, de Nantes, à la demande de la préfecture. Elles servent à enregistrer le comportement des animaux. »
Une nouvelle expérience menée en février-mars 2019
Fin février 2019, la société responsable des éoliennes a dû, par arrêté préfectoral, couper l’équipotentialité des éoliennes : c’est-à-dire le câble de mise à la terre. Un câble qui pourrait être à l’origine de la plupart des maux provoqués chez les animaux et les humains.
Contrairement à la plupart des parcs éoliens, où le câble souterrain est blindé, là, il s’agit d’un câble de cuivre nu. Ce qui, avec la présence des failles remplies d’eau, pourrait expliquer pourquoi l’électricité se propage autant. »
Contacté le 25 mars, alors que l’expérimentation est proche de la fin, Didier Potiron annonce d’ores et déjà un résultat aux antipodes de ce qui était attendu :
Pendant les dix jours où l’équipotentialité (le câble de mise à la terre, NDLR) a été coupée, les nuisances se sont en fait aggravées ! On a perdu quatre bêtes et un chien… Et notre ressenti personnel d’inconfort a été beaucoup plus fort. »
Depuis le 18 mars 2019, les éoliennes sont rebranchées une à une, à raison d’une tous les trois jours. « Le parc sera complètement rebranché le 3 avril », explique l’éleveur.
Le câble à 20 000 volts en cause ?
Géobiologues, école vétérinaire et autres experts mandatés pour cette procédure vont ensuite s’atteler à analyser tous les résultats récoltés pour tenter de comprendre d’où vient précisément le problème. Le câble en cuivre semblant « disculpé », une autre hypothèse resurgit, comme l’indique Didier Potiron :
Le parc n’était pas réellement sous tension. Seul le câble de mise à la terre a été débranché. Le câble de 20 000 volts, alimenté par les éoliennes, est resté en tension. Il semble qu’il y ait beaucoup de fuites électriques. Car lorsque le parc tombe en panne, en revanche, les nuisances diminuent très nettement.
L’éleveur se souvient ainsi d’une panne de quatre jours, en février 2017 :
Nous avions fait venir un huissier pour constater sa mise hors tension. Pendant cette courte période, le troupeau s’est enfin comporté normalement. Cela a été constaté par les chiffres du robot de traite, analysés par un expert. Et nous-mêmes, on a retrouvé le sommeil. »
Un rapport final fin mai 2019
Si le flou persiste sur l’origine exacte des problèmes, l’éleveur assure que les services de l’Etat, et notamment « le député Yves Daniel » ont d’ores et déjà admis une vérité, selon l’agriculteur :
À chaque fois qu’il y a une modification dans le branchement du parc éolien, il y a un impact important sur les exploitations. La seule solution, pour nous, serait un arrêté préfectoral obligeant à l’arrêt définitif de l’exploitation du parc. »
Une décision qui, on s’en doute, ne se pas prise à la légère, étant donné les enjeux financiers… Les éleveurs, eux, espèrent avoir connaissance du rapport final des experts d’ici fin mai 2019.
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Éoliennes : vers un scandale sanitaires ?
[GRAND FORMAT] Dans la région de Nozay, un mystère entoure le parc éolien des Quatre seigneurs. Animaux d’élevage en surmortalité ou victimes de nombreux troubles du comportement, habitants également touchés par des maux de gravité diverse… Ces problèmes, mis sur le compte d’ondes produites par les aérogénérateurs, mais difficiles à relier scientifiquement parlant, s'accumulent. Aujourd'hui, riverains et animaux sont à bout de souffle.>> Un dossier à retrouver cette semaine dans L'Éclaireur.
Publiée par L'Eclaireur de Châteaubriant sur Jeudi 21 février 2019
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