
Un homme de 61 ans a été condamné à trois mois de prison avec sursis pour banqueroute et exécution d’un travail dissimulé, jeudi 4 avril, par le tribunal correctionnel d’Alençon, pour des faits commis entre 2013 et 2018.
Un homme de 61 ans a été condamné à trois mois de prison avec sursis pour banqueroute. Co-propriétaire d’une boutique de cycles et de motoculture à Sées, il a été reconnu coupable d’avoir détourné ou dissimulé une partie de l’actif entre le 6 avril 2013 et le 15 janvier 2018 et de ne pas avoir tenu de comptabilité du 1er janvier 2013 au 14 octobre 2014. Le tribunal l’a également jugé responsable de l’exécution d’un travail dissimulé du 14 octobre 2014 au 14 mai 2015.
La liquidation judiciaire de son entreprise avait été prononcée le 6 octobre 2014. L’inventaire du stock réalisé par le mandataire judiciaire, le mois suivant, ne correspondait pas au produit des ventes encaissées sur le compte de la société « mais à celui retrouvé sur vos comptes », détaille le président Hugo Rialland.
« J’avais 200 000 € de stock et il m’a fallu huit mois pour l’écouler. Les comptes de la société étaient bloqués et je m’étais engagé à payer les fournisseurs même quand la liquidation a été prononcée », répond le prévenu qui reconnaît les faits.
« Il y a eu un arrêt d’activité jusqu’en janvier 2015, date de la fermeture de votre boutique. Puis vous l’avez rouvert, sous le statut d’auto-entrepreneur en mai 2015 », signale le président du tribunal. Il a alors déclaré « 7 000 € en 2015, 21 000 € en 2016 et 14 000 € en 2017 ». Or, ses comptes font état « d’un chiffre d’affaires plus important ».
« J’étais tombé dans l’alcool, je n’étais pas beau à voir ! »
L’homme explique ces faits « par un état second, un état dépressif » à l’époque. « J’étais dans un mal-vivre, la peur de l’échec. J’étais tombé dans l’alcool, je pesais 30 kg de plus, je n’étais pas beau à voir », confie le sexagénaire qui avait, alors été quitté par sa compagne. « Quand on manque d’avoine dans l’écurie, les chevaux se battent », annonce-t-il à titre d’explication. Il resitue le début de ses difficultés en 2008 « avec la pseudo-crise ».
« J’avais trop de charges. Mon chiffre d’affaires a baissé et je ne gagnais plus assez pour faire face aux frais. Chaque année, j’ai abandonné des comptes courants. Plus de 200 000 € au total .»
Dépression sévère
« L’inventaire réalisé par le mandataire judiciaire fait état de 2 380 € d’actifs mais à l’arrivée, il n’y en a que 48,39 € de réalisé ! Qu’est devenu le stock ? Tout comme il y avait plus de véhicules de mentionné dans ce stock ! », souligne pour le Ministère Public, Laura Mérigeaux, magistrate en formation, selon qui :
« il y a eu dissimulation d’un certain nombre d’articles. Il n’y avait plus aucun actif mobilier alors que l’inventaire dressé établissait l’inverse et ont été retrouvé sur les comptes personnels du prévenu. La société a bien été dépouillée sans contreparties ».
Elle entend bien l’argument de « la dépression sévère » du prévenu « mais est-ce que ça justifiait le détournement d’actifs et de faire couler la société ? », s’interroge encore l’auditrice de justice.
Elle pointe du doigt « l’absence de comptabilité » et les abus de biens sociaux et de confiance pour lesquels le prévenu est également poursuivi. « Il a encaissé 77 chèques de clients pour un montant total de 18 750 € sur son compte personnel avant la liquidation judiciaire ! ». Elle requiert alors douze mois de prison avec sursis et une interdiction d’exercer toute activité commerciale pendant sept ans ainsi que la confiscation des scellés « y compris la Ferrari ».
Les scellés confisqués « sauf la Ferrari »
Me Nathalie Catteau-Lefrançois, l’avocate de la défense, appuie sur le fait « qu’entre 1991 quand il a repris la boutique et 2013, il n’y a eu aucun incident de gestion ». Elle justifie l’égarement du prévenu par « une pression familiale qui s’exerçait sur lui ». Or, devant les difficultés financières de son entreprise, « il s’est installé dans l’alcool et c’est son ami qui tenait tout seul la boutique ».
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Elle plaide la relaxe pour la banqueroute par dissimulation d’actifs, l’abus de bien social et l’abus de confiance « car il n’a pas encaissé de gaieté de cœur les chèques sur son compte personnel ». Elle précise que son client a « abandonné 152 000 € entre 2006 et 2010 pour que sa société puisse continuer à fonctionner avec son associé ».
« Et il a régulièrement versé des sommes de 2000 € à 5 000 € de son compte personnel à celui de la société. Il fallait qu’il ait du matériel pour continuer à travailler. Dans sa détresse de gestion, il a utilisé son compte personnel pour payer les fournisseurs ».
Elle rejette également la demande de confiscation de la Ferrari « car son achat remonte à fin 1996 donc c’est bien antérieur à la liquidation judiciaire. Il l’a d’ailleurs cédé à sa fille car il ne pouvait pas subvenir à son entretien et au contrôle technique. Les frais d’immatriculation ont été réglés, il n’en est plus le propriétaire donc elle ne peut pas être confisquée ».
Le sexagénaire a finalement été condamné à trois mois de prison avec sursis pour banqueroute et exécution d’un travail dissimulé. Il a été relaxé pour abus de biens sociaux et abus de confiance. Les scellés ont été confisqués « sauf la Ferrari ».